Guantanamo, Abou Graïb et les Droits de l'Homme
J'apprends, en écoutant aujourd'hui France Info, le plus politiquement et professionnellement correct des médias français avec Le Monde (qui commence aujourd'hui une grande campagne contre Nicolas Sarkozy), que Botero (pour lesquel je n'ai pas de penchant particulier mais des goûts et de couleurs...) vient de produire plusieurs oeuvres immortelles signées Abou Graïb. Il veut ainsi protester contre la violation des Droits de l'Homme commise par la première puissance du monde explique une de ses apologètes. Elle ajoute que les pays du tiers-Monde qui violent ces mêmes droits, ce n'est pas bien mais, bon, ce sont des pays (pauvres) qui ont des excuses.
Etant de parti pris, je caricature mais je demande à l'auditeur (ou au lecteur : le reportage est peut-être en ligne sur le sîte de la radio) de vérifier que rien de ce que je dis n'est faux. Et j'en viens donc à autre chose qu'à la propagande.
Première remarque : oui, Guantanamo et Abou Graïb et tout ce qui y ressemble posent un problème aux démocrates et aux adeptes des libertés (il existe un mot plus court pour les désigner : libéraux). C'est tellement vrai qu'un des meilleurs essayistes du pays et l'un de ses esprits les plus subtils, Pascal Bruckner, a publié il y a quelques mois dans Le Figaro du 11 mai 2004 un papier qui rompait avec la politique américaine de Bush. Lisez ce papier et vous comprendrez quelle fracture a traversé la maigre cohorte des partisans français de l'intervention américaine en Irak.
Certains autres, dont l'auteur de ces lignes, ont refusé de jeter le bébé avec l'eau du bain ou, pour le dire autrement, de caler à la première difficulté, de récuser le monde réel, celui des mains sales, pour le monde idéal de la morale de Kant, celle qui a les mains propres mais qui, selon la célèbre formule de Nietzsche, n'a pas de mains. Il était un peu difficile d'avoir pendant tant d'années soutenu La Tcheka, la Guépéou, le NKVD sans l'ombre d'une hésitation pour se précipiter sur le premier bon prétexte venu, celui qui fait dire à la gauche : cet homme s'est égaré mais il n'est pas définitivement perdu !
La différence entre les démocraties et les dictatures, c'est le New Yorker, nul n'en disconvient. Et je ne doute pas que Guantanamo et Abou Graïb finiront pas être fermés. Mais comme j'aimerais que Botero ait un jour envie d'utiliser son (énorme) talent pour rendre hommage aux victimes du terrorisme aveugle, celui qui tue des civils partout sur la terre et trop souvent au nom d'Allah. Je risque fort d'attendre longtemps.
Paul Ink le 22 juin 2005