mardi, novembre 22, 2005

Les trois fardeaux de l'homme blanc

Depuis le 11 septembre, les Occidentaux doivent s'interroger sur leur propre histoire et la réinterpréter afin de l'habiter et de de l'assumer face au reste du monde. Comment résumer la question ? Disons qu'il y aurait un spectre de positions qui irait de "L'Occident est une civilisation corrompue et décadente en Europe, guerrière en Amérique, ennemie partout" à "La civilisation universelle est occidentale et elle est le seul modèle."

Par quoi commencer ? Par répondre à ceux, les islamistes pour ne pas les nommer, qui sont entrés dans un processus fanatique de haine de l'Occident. Ce qu'on peut assûrement dire des Occidentaux, c'est qu'ils ont été curieux du monde, curieux des moeurs mais aussi des inventions, des techniques, de la science et qu'ils ont été de hardis marins. Du moins est-ce la thèse de Fernand Braudel dans "Grammaire des civilisations" (Champs, Flammarion, 1987). Ils ont "découvert" l'Amérique, ils ont passé le cap de Bonne Espérance et l'Europe a été un agent puissant de l'unification du monde. Que la curiosité se soit parfois, souvent même, accompagné d'un esprit de lucre et de pratiques totalement condamnables comme la traite des Noirs, cela est incontestable. Mais les européens n'étaient pas les seuls, loin s'en faut, à pratiquer l'esclavage. Les Arabes l'on pratiqué à une bien plus grande échelle avec la traite trans-saharienne qui subsiste encore, par bien des aspects, en Mauritanie ou au Soudan : "(...) l'islam classique (fut) une civilisation esclavagiste par excellence." (Braudel, p. 93). Lors de sa première et formidable expansion entre la mort du Prophète (632) et la défaite de Poitiers (732), l'Islam a conquis avec une foudroyante rapidité d'immenses régions dans toute l'Eurasie. Le destin de l'Europe en a été totalement bouleversé : comme l'explique Henri Pirenne dans son admirable "Histoire de l'Europe" (Alcan et NSE, 9° édition 1936), le centre de gravité géographique, économique et politique de l'Europe est remonté très au nord, c'en était fini de la "mare nostrum". Et le retour des villes en Europe va avoir son berceau plutôt du côté des brumes de Bruges.

L'Europe a trois poids très lourds à porter et qu'elle porte mal : d'une part, la colonisation, d'autre part les théories racistes ayant abouti à la Shoah, enfin deux guerres mondiales. Cela fait beaucoup. Porter mieux ces fardeaux, c'est se donner comme objectif de comprendre et de dire au monde quelques leçons fondamentales sur la guerre, le racisme et le colonialisme. C'est retrouver sa place, forcément dangereuse, sur la scène du monde. S'absenter de cette scène, ce que font actuellement les Européens (voir leurs humiliantes reculades sur la question du programme nucléaire iranien) serait plus dangereux encore selon l'adage implacable : si tu ne t'occupes pas de la politique, la politique s'occupera de toi.

Commençons par les guerres :

Aujourd'hui, les livres qui racontent la Grande Guerre posent cette question : comment une telle absurdité a-t-elle été possible ? Et, illusion rétrospective, on a envie de dire : Quelle absurdité, en effet ! C'est que nous ne voyons plus le monde avec les yeux des contemporains. Outre qu'ils croyaient tous à une guerre courte, funeste erreur, ils occupaient la scène du monde. La France, blessée par l'annexion de l'Alsace Lorraine, ou l'Allemagne post-bismarkienne, étaient les grandes puissances de l'époque et l'Amérique n'a fait son entrée sur la scène du monde qu'en 1917 précisément parce qu'elle devait se mêler de ce conflit. La guerre de 14 va ouvrir la voie à une période d' "ensauvagement" pour utiliser le titre du très grand livre de Thérèse Delpech (Grasset, 2005). La Révolution russe va provoquer une guerre civile, l'intervention de puissances étrangère et finalement une dictature sans merci des Bolcheviks. Partout en Europe, la violence est là pendant la fin des années 10 et le début des années 20. "Les Réprouvés", le livre qui fit connaitre Ernst Von Salomon donne une bonne idée, vu du côté nationaliste anti-bolchevik, de la haine qui animait ces coeurs qui avaient vécu tant d'horreurs pendant la guerre. Ajoutons qu'il y a certainement de la part de la France à honorer tous ceux qui, venant de l'empire colonial, se sont battus pour la France.

La deuxième guerre mondiale va définitivement marginaliser l'Europe comme en témoigne cette phrase célèbre de Winston Churchill expliquant qu'après la deuxième guerre, l'Amérique avait repris le flambeau du leadership mondial "de nos mains glacés".

Pour le reste, l'Europe devrait répéter au monde qu'elle a fait l'expérience de la puissance et que cette expérience a abouti à sa destruction et à sa marginalisation. Thérèse Delpech fait remarquer que l'apologie française de la "multipolarité" oublie ce détail que l'équilibre "multipolaire" des puissances en Europe a abouti à la guerre générale. Car d'autres guerres se préparent. Aujourd'hui l'Europe est un géant économique et un nain politique. Sur de nombreuses questions vitales pour sa sécurité, l'Europe marque contre son camp. Le meilleur exemple est donné par la question de Taïwan qui se laisse aisément résumer : La Chine ne veut, sous aucun prétexte, renoncer à Taïwan, c'est un principe fondamental de sa politique. Taiwan, qui redoute une invasion a des accords militaires avec les Etats-Unis. Les choses sont donc simples : ou bien les Etats-Unis n'interviennent pas et leur parole dés cet instant ne vaudra plus rien, ils ne seront plus une grande puissance, ou bien l'Amérique interviendra militairement, ce qui est beaucoup plus probable. Et c'est au minimum une guerre régionale de grande ampleur entre la Chine et les Etats-Unis qui commence. Les Européens devraient donc user de pédagogie et d'unité pour dire aux Chinois "Soyez sur la question de Taïwan, d'une extrême prudence !". Ils font tout le contraire, certains allant jusqu'à dire que c'est une question intérieure chinoise pour avoir accès à l'énorme marché chinois.

Paul Ink

1 Comments:

At 28 juillet 2007 à 14:38, Blogger Paul Ink said...

At 13 avril 2006 18:45, L.elie.13 said...

Bonjour Paul.Je viens très rarement je m'en excuse mais en parlant de la Chine vous apportez en quelque sorte de l'eau à mon moulin.Comme j'en ai fait la remarque dans un précédent commentaire la chine est notre ennemi de demain.Sa puissance militaire s'accroit.La politique de l'enfant unique donne une générations d'hommes qui sont prêt à se battre.Traffic de femmes ,manque de femmes,l'homme à les crocs ...Que doit faire l'Europe?Je n'en ai aucune idée?Mais enfin surement pas encourager les chinois à une guerre que nous ne pourrions (c'est mon avis soutenir).Savez que le mot animal n'existe pas en chinois.On dit objet.Aucune différence entre une chaise ou un chat pour un chinois.Ces hommes sont durs,très durs.Heureusement,si je puis dire,dans 30 ans vous et moi ne seront plus là.
L.elie.13

 

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