Guerre civile européenne
L'actualité de ces derniers jours est loin d'être sans intérêt, je pense en particulier au printemps de Beyrouth et à la liquidation d'Aslan Maskhadov par les forces spéciales russes mais je n'ai malheureusement rien à dire d'original là dessus. Concernant la Tchétchénie, j'approuve entièrement le texte d'André Glucksmann, "Le nouveau tsar vous remercie..." publié dans Le Monde du 09/03/05. A ce propos, j'ai aperçu avec beaucoup de plaisir la Une du Monde du 8 mars, je crois, et qui posait la question de savoir si la politique de Bush n'était pas en train d'engranger ses premiers résultats (éléctions en Irak, reprise du processus de paix israélo-palestinien, retrait syrien du Liban etc). Le seul fait que la question ait été posée me semble un grand progrès, inimaginable du temps d'Edwy Plenel. Rien que pour cela, il faut se réjouir de son départ.
Samedi matin, je suis allé à la conférence que l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales consacrait à Raymond Aron pour le centième anniversaire de sa naissance. Ce qui m'a frappé, c'est le côté presque obsédant du débat autour des néo-conservateurs. Peut-être d'ailleurs était-il si vif parce que le caractère désastreux ou supposé tel de l'intervention anglo-américaine en Irak a perdu de son évidence. J'aurais dû poser la question à Daniel Vernet qui intervenait et qui dans le livre co-écrit avec Alain Frachon, "L'Amérique messianique, la guerre des néo-conservateurs", considère précisément la politique de Bush au Moyen-Orient comme un évident fiasco. Et pourtant Vernet n'est pas le pire des journalistes...
Je suis actuellement plongé dans "La guerre civile européenne" de l'historien allemand Ernst Nolte (Editions des Syrtes, 2000). Il était depuis un moment dans ma bibliothèque mais si j'ai éprouvé le besoin de le lire, c'est parce que j'avais écrit ces textes sur la crise des sociétés européennes. Nolte, au moins en France, est sorti du purgatoire après que François Furet dans "Le passé d'une illusion" (Robert Laffont Calmann-Lévy, 1995) lui ait consacré une longue et laudative note. L'oeuvre de Nolte est consacrée presque entièrement aux régimes totalitaires et aux grandes idéologies de la première moitié du XX° siècle, communisme, fascisme, nazisme. Pour dire les choses vite la thèse centrale de "La guerre civile européenne" est que le premier mouvement, celui qui permet d'expliquer tous les autres, celui sans lequel rien n'est expliquable c'est la révolution d'octobre et la violence politique inédite que les bolcheviks mettent en oeuvre dés qu'ils sont au pouvoir. Le fascisme italien et le national-socialisme ne seraient que des réponses à cet ébranlement fondamental. Bien entendu, une telle thèse a provoqué des polémiques violentes car Nolte a été soupçonné de vouloir déculpabiliser l'Allemagne.
Nolte a me semble-t-il un autre objectif : il tente de montrer ce qu'a représenté Octobre pour des millions d'Allemands qui virent des Russes, des Ukrainiens, des Baltes se réfugier en masse en Allemagne et raconter les atrocités commise par les bolcheviks. Et combien les appels à la guerre civile lancés dans toute l'Europe par Lénine vont provoquer la peur et la haine. Cette histoire des despotismes modernes s'est terminée en Europe avec la chute du mur mais comment oublier que près d'un quart de l'humanité vit encore sous ce type de régime. Et j'en reviens à ce qui avait été mon intuition première : on ne peut rien comprendre au pacifisme, à l'hédonisme et finalement à la mollesse européenne face au monde actuel à commencer par la menace islamiste si l'on ne revient pas à cette guerre civile qui a ensanglanté l'Europe pendant près de trente ans.
Paul Ink le 13 mars 2005
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