mercredi, janvier 19, 2005

Sur la crise des sociétés européennes (3)

Sur la crise des sociétés européennes (3)

Il y a dix ans, en 1995, la France découvre qu’un jeune issu de l’immigration, né en Algérie mais vivant à Vaulx-en-Velin depuis son enfance, a dirigé une cellule terroriste liée au GIA algérien et commis une série d’attentats qui ont ensanglanté le pays en particulier une bombe qui explose dans le RER à la station saint-michel et fait 8 morts le 25 juillet. Il est tué, pratiquement sous les caméras de la télévision deux mois plus tard le 29 septembre. Il a 24 ans.

A l’époque, c’est la stupeur et l’inquiétude. Le Monde publie un article dans lequel est développée l’idée suivante : ce que nous redoutions tant a fini par arriver : la jonction entre des jeunes issus de l’immigration et le terrorisme. Quelques jours plus tard le journal publie un long entretien de Khaled Kelkal avec un sociologue allemand Dietmar Loch qui l’avait interviewé 3 ans avant ces évènements en 1992 dans le cadre d’une étude sur l’intégration des étrangers en France.

On veut d’abord faire de Khaled Kelkal un « jeune » comme un autre ce qui présente l’inconvénient de supposer que tous les « jeunes » finissent par basculer, comme on dit, dans la délinquance. En effet, après de bonnes études primaires et secondaires, Kelkal qui fréquente un excellent lycée commence à commettre des vols (recel de voitures volées, vols à la voiture bélier) et se retrouve en prison. Pourquoi est-il devenu délinquant ? Immense question ! Est-ce pour faire comme son frère aîné Nouredine ? Est-ce parce qu’il souffre de discrimination dans sa classe ? Est-ce parce que dans les cités la délinquance est devenu un « conformisme déviant » comme disent les sociologues ? On n’a en tout cas que deux possibilités : soit insister sur la banalité de l’itinéraire de Kelkal jusqu’à ce qu’il devienne un islamiste radical mais, encore une fois dans ce cas, il faut accepter cette idée, politiquement très incorrecte, que la délinquance fait partie de l’itinéraire habituel de nombreux jeunes issus de l’immigration soit s’interroger sur ce qu’une certaine délinquance a de particulier dans ce qu’elle signifie non de manière illégale de gagner sa vie mais de violence et de haine de la société et comment cette délinquance peut facilement tisser des liens avec la haine anti-occidentale qui est au cœur de l’intégrisme islamique.

Quoi qu’il en soit, il arrive à Kelkal ce qui va arriver à de nombreux délinquants arabes en prison : il va rencontrer l’Islam. Et l’on tombe sur le deuxième tabou. Le premier, c’était le refus de reconnaître la surdélinquance des jeunes issus de l’immigration.

Paul Ink